LEE Seughwan
Terrarium Synthétique – Protocole d’Autonomie
À l’ère numérique, la vie et la nature se voient progressivement réduites à des données numérisées. L’intelligence artificielle, la biotechnologie et les technologies fondées sur des algorithmes remplacent les sens humains, quantifient la nature et réorganisent des écosystèmes complexes et imprévisibles en un ordre numérique. Sous cette logique de contrôle technologique, l’artiste explore la manière dont la nature se recompose en un « paysage synthétique ».
Le terme terrarium désigne à l’origine un écosystème naturel réduit et enfermé dans un récipient de verre, reproduit artificiellement. Ainsi, Synthetic Terrarium renvoie à une nature virtuelle générée par des algorithmes d’images produits par IA – un écosystème simulé fondé sur les données et le calcul. Il ressemble à la nature réelle, mais constitue un paysage déformé par l’observation, le désir et le contrôle humains. L’artiste mène des explorations directes dans des environnements naturels réels, collectant des coordonnées GPS et des données d’observation, qu’il introduit ensuite dans une IA générative afin de produire des paysages virtuels correspondant à ces lieux. Parmi les images obtenues, il sélectionne celles qui reflètent des caractéristiques régionales afin de recomposer des paysages naturels altérés. Ces paysages, proches de la réalité, sont en réalité des images nouvelles de la nature, nées de la combinaison des systèmes de connaissance humains et des algorithmes numériques – un simulacre de nature créé par l’homme.
Autonomy Protocol part de la question suivante : la nature peut-elle conserver son autonomie à l’ère numérique ? Possède-t-elle encore une temporalité et une vitalité propres, ou n’est-elle plus qu’une simulation soumise aux systèmes de calcul humains ? L’exposition met en lumière
cet écart, tout en examinant l’impact des paysages produits par la technologie sur notre avenir durable, ainsi que les menaces qu’ils peuvent représenter.
Terrarium Synthétique – Protocole d’Autonomie visualise les tensions entre la nature et l’humanité sous contrôle technologique, les frontières entre le réel et le virtuel, et les contradictions entre autonomie et contrôle. En définitive, elle confronte la fracture entre l’imagination technologique centrée sur l’humain et l’essence de la nature, et nous invite à réfléchir au futur que nous sommes en train de choisir. Série Les calanques de Marseille Paysage aux coordonnées 43.208588, 5.372566 Dessin et image générée par l'IA
Série Les calanques de Marseille
Le titre de cette série renvoie à des coordonnées GPS précises. Par exemple, « 43.208588, 5.372566 » désigne un point situé quelque part dans les Calanques, près de Marseille. Ainsi, chacune des œuvres de cette série propose une vision issue de ces coordonnées. Toutefois, le paysage représenté n’est pas exclusivement celui qui existe à cet endroit : il s’agit d’un environnement où se mêlent le réel et le virtuel.
Pour élaborer ces images, j’ai utilisé des outils d’intelligence artificielle générative développés par Microsoft et OpenAI, tels que ChatGPT et Bing Image Creator. En fournissant à l’IA différentes coordonnées GPS et en lui demandant : « Montre-moi le paysage que tu vois à partir de ces coordonnées » ou « Quel est le paysage de la mer des Calanques à ce point précis ? », j’ai obtenu des résultats étonnants. L’IA n’a pas pu reproduire fidèlement la vue réelle, mais elle a su capter les caractéristiques naturelles propres à la zone indiquée.
La réalisation de cette série s’est déroulée en deux étapes. D’abord, j’extrais environ trois cents images générées à partir de chaque coordonnée. Parmi celles-ci, je sélectionne les images qui présentent une forte proximité avec le réel — non seulement les éléments naturels, mais aussi la composition, la disposition ou la profondeur. Ces images retenues me servent ensuite à reconstituer un nouveau paysage : une fusion entre nature réelle et nature virtuelle, une réinterprétation des coordonnées GPS indiquées. Le dessin final est exécuté au stylo bille.
Ainsi, les paysages de cette série existent dans une circulation constante entre réel et virtuel : ils sont à la fois tangibles et fictifs.
Dans la seconde étape, lorsque les couleurs et les formes sont supprimées, apparaît une structure composée de valeurs chiffrées : les traces des innombrables calculs accumulés dans la production de ces images. Cela révèle que le paysage perçu dans le dessin ne repose plus sur l’incertitude du réel, mais sur un processus continu de quantification issu de la fusion avec des données virtuelles. Les chiffres qui affleurent symbolisent alors les différentes couches de perception analysées par l’apprentissage algorithmique et les données incorporées par l’IA pour produire ces paysages.







