Née en 1991, vit et travaille à Paris.
Abigaïl Auperin se fait des films, littéralement. Son cinéma intérieur nous parvient par des images suspendues, comme prises juste avant l’action, ou juste après. Pour chaque photographie, elle consacre un temps minutieux à l’écriture de story-boards, au repérage des décors, au choix des costumes, maquillage et accessoires, à la direction des modèles, leur expression, la position de leur corps et de leurs mains et, évidemment, à la création de la lumière. Les shootings, eux, sont rapides. Ils capturent l’image mentale.
La réalité qu’elle fait exister est à la fois totalement vraie et totalement artificielle – faite de 99 % de polyester et 1% d’idéal, pour reprendre deux de ses titres. Dans cette réalité, l’écoulement du temps est aboli, aucun corps ne peut mourir, tout est neutralisé pour toujours. Ses emprunts à l’esthétique publicitaire, au camp, à la peinture pompier, au cinéma de genre, aux années 80, à tout ce que la culture occidentale a produit de plus factice, ne servent qu’à cela : préserver le réel du dépérissement ; nous préserver, nous, de la cruauté.
Plonger dans le faux jusqu’à ce qu’il devienne vrai, c’est ce que font les enfants qui jouent. Ils se projettent à corps perdu dans des mondes aux possibilités infinies en maniant des figurines. Ils les modèlent selon leurs angoisses et leurs désirs. Elles demeurent impassibles.